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Beki Probst : « Le cinéma, c’est la vie ».

 

CINÉMA. Sa passion est intacte, son élégance éternelle. De Berlin à Cannes en passant par Fribourg et Locarno, Beki Probst, fondatrice entre autres du Marché du film européen, continue d’œuvrer en coulisses et de festivals en festivals, au rayonnement et au partage du cinéma helvétique. 

Le taxi est jaune et nous dépose devant le Waldorf Astoria sur Park Avenue. Le temps d’un battement de porte tambour et nous voici dans un lobby feutré aux murs marbrés ouvrant sur le bar art-déco de l’hôtel. Le temps s’arrête, les bruits se taisent, là, sur un fauteuil en tissu velours frappé jaune moutarde, se tiendrait presque Sofia Loren. Enfin c’est tout comme puisque nous sommes au Schweizerhof Hotel à Berne et que c’est Beki Probst, un capuccino fumant sur la table, qui nous attend et avec elle tout un monde cinéphile et doré.

 

The grande dame du cinéma suisse.

C’est entre deux festivals et un week-end au Portugal que nous réussissons à l’attraper, ce joyeux colibri de bon augure qui aime à se déplacer avec les siens, qu’ils soient proches, amis, présidents de festival ou cinéphiles comme elle aguerris.

 

Voilà toute une vie maintenant que la Bernoise Beki Probst, née à Istanbul, œuvre à la défense et au rayonnement du cinéma helvétique – ce dernier lui a d’ailleurs décerné en 2019 le prix d’honneur du cinéma suisse. Fondatrice des cinémas Quinnie à Berne, directrice artistique du festival Stars de demain à Genève de 1988 à 1996, Beki Probst crée en 1985 un premier marché du film au Festival de Locarno avant de lancer à Berlin en 1988 l’European Film Market. Aujourd’hui encore, cette passionnée siège dans de nombreux festivals, dont le FIFF le mois prochain.

 

Un changement de génération significatif.

Le FIFF millésime 2022 met d’ailleurs l’accent sur un cinéma apocalyptique que Beki Probst trouve salutaire. « Cela réveille les consciences et provoque un choc positif, explique-t-elle.

Le cinéma suisse est très critique, c’est notre force et c’est très bien. Nos réalisateurs se posent des questions, sur notre planète, notre société. Le cinéma doit nous aider à réfléchir à ce qu’il se passe et trouver des solutions pour l’avenir. »

 

Un changement de génération et dans le cinéma s’opère, dont Beki Probst salue l’arrivée et l’optimisme. « Ils ont une nouvelle vue sur le monde, différente de la nôtre, se félicite la fondatrice de l’EFM. Leur énergie est extraordinaire, ils font preuve de talent et leurs idées peuvent être révolutionnaires. »

 

« Un art populaire irremplaçable. »

L’enjeu des prochaines années, sans surprise, reste l’attachement à la salle obscure, au plaisir de « s’asseoir et d’être ensemble ». « Le cinéma est un art populaire, c’est un moment de partage, avant, pendant et après le film. C’est un crime de cantonner des œuvres à un public d’abonnés, tranche Beki Probst à l’évocation des plateformes digitales. Je reste avide de voir des films ».

 

Créer du lien, vivre intrinsèquement les émotions d’un film. Pour Beki Probst, le cinéma, c’est la vie. Continuons donc à la célébrer.

 

 

Le coup de chapeau de Beki Probst

« Puis-je en avoir deux ? Le premier à David Streiff, ancien directeur de Locarno qui m’a donné la chance de créer le premier trade show. C’est le départ.

Et le second à Moritz de Hadeln, ancien directeur du Festival de Berlin, qui m’a permis de créer le Marché du Film.

 

QUELQUES DATES

2019 : Prix d’honneur du cinéma Suisse 2019

2018 : Caméra de la Berlinale

2013 : Prix d’honneur des Journées de Soleure

1988 : Création de l’European Film Market à Berlin

1988-1996 : Directrice artistique Festival Stars de Demain à Genève

1985 : Création du Trade Show de Locarno

1979 : Création des salles Quinnie à Berne

Elsa Duperray, LA BOUCLE.

Portrait publié dans le magazine de cinéma suisse romand Avant Première, numéro de décembre-janvier 2022.